UNE RESPIRATION
DE COMBAT
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Le Sahara Occidental reste le dernier
territoire à décoloniser sur le continent
africain.
Situé entre le Maroc, la Mauritanie, et l’Algérie, cette ancienne colonie espagnole est envahit illégalement par le Maroc en 1975. La brutalité de l'invasion militaire a forcée la majeure partie du peuple sahraoui à fuir vers des camps de réfugiés dans le désert algérien. Un mur militaire marocain de 2 700 km sépare le peuple. Les Sahraouis restés sur le territoire occupé sont minoritaires face aux colons et subissent la répression exercée par les autorités marocaines.
Depuis 1991, les Nations Unies ont été mandatées d'organiser un référendum d'autodétermination. Cependant un statu quo règne, laissant l’occupation marocaine s’intensifier, au mépris du droit international.
La ville coloniale impose un cadre socio-politique qui tend vers une assimilation forcée des Sahraouis, et un contrôle des corps colonisés et des résistances basé sur le tout répressif.
Pour les Sahraouis, ce désert est une prison à ciel ouvert qui se matérialise par leur impuissance à faire respecter leurs droits sur ce territoire. Un combat de respiration oppose au quotidien deux forces : le colon et le colonisé. Plus les Marocains occupent l’espace, et plus la respiration des Sahraouis est étouffée.
Ce projet s’articule autour d’un travail photographique et un travail d’écriture de témoignages mené avec des habitants sahraouis.
Les portraits, pour la plupart anonymes, sont réalisés à l'intérieur des maisons ou sur les toits, afin d'éviter la délation des colons marocains et échapper à la surveillance policière.
Les textes sont écrits sur des papiers d’emballage de sacs de ciment collectés sur les chantiers de construction.
Ce support d’écriture fait écho aux récits des survivants des disparitions forcées du bagne secret de Kalaat M’gouna.
Face à l’augmentation du nombre de disparus (entre 1976 et 1991), des travaux d'adaptation furent réalisés dans ce bagne. Les sacs de ciment glanés par les prisonniers seront un des rares supports clandestins d’écriture et de communication entre les cellules.
Les ex-disparus expriment le sentiment qu’à leur libération ils migrent d’un bagne à une plus grande prison : le Sahara occupé. Un sentiment que partage les sahrouis vivant sous occupation aujourd'hui.
Les autorités marocaines refusent l’entrée au Sahara Occidental et expulsent les observateurs étrangers, qu’ils soient journalistes, membres d'une ONG, juristes, militants, députés...
Inaudibles et invisibilisés par cet enfermement depuis 1975, les témoignages des Sahraouis ont ainsi été écrits clandestinement sur ce même support, avec le risque quotidien qu’ils disparaissent aux mains de la police marocaine.
Ce papier de ciment fait également référence à l’expansion urbaine résultant du peuplement marocain. Deux entreprises européennes sont implantées illégalement et produisent le ciment.
Aujourd’hui, le développement du Sahara est un argument central du Maroc pour justifier et légitimer sa présence illégale. Les constructions et l’urbanisme figurent comme une vitrine pour cacher l’oppression et les violations du droit international.
La forme finale de ce projet résulte à la fois de l'aspect clandestin de la réalisation et de la censure opérée par les autorités. Deux disques durs externes seront secrètement volés par la police marocaine et remplacés par des disques vides. Les témoignages manuscrits, volés et remplacés par des feuilles vierges. Enfin, un dernier disque dur disparaît d'un ordinateur portable lors d'une opération policière.
Malgré ces aléas, certaines photos sont sauvées et les témoignages ont été recopiés sur le même papier par les réfugiés sahraouis en France. Les faces extérieures des témoignages sont ici présentées à côté des portraits correspondants, et les textes sont donc présentés à part. Il s'agit de souligner qu'à la censure s'ajoute une autocensure, résultant d'une peur des représailles.
L’ensemble du projet expose l'oppression coloniale et ses mécanismes de dépossession (territoriale, historique, culturelle, économique, documentaire). À la marge de la représentation depuis 1975, la participation des habitants et l’ensemble des témoignages sonnent comme un cri d’existence face à l’interdiction d’être et l’injonction à disparaître.
Une respiration de combat, souligne les tensions entre le visible et l'invisible.
Situé entre le Maroc, la Mauritanie, et l’Algérie, cette ancienne colonie espagnole est envahit illégalement par le Maroc en 1975. La brutalité de l'invasion militaire a forcée la majeure partie du peuple sahraoui à fuir vers des camps de réfugiés dans le désert algérien. Un mur militaire marocain de 2 700 km sépare le peuple. Les Sahraouis restés sur le territoire occupé sont minoritaires face aux colons et subissent la répression exercée par les autorités marocaines.
Depuis 1991, les Nations Unies ont été mandatées d'organiser un référendum d'autodétermination. Cependant un statu quo règne, laissant l’occupation marocaine s’intensifier, au mépris du droit international.
La ville coloniale impose un cadre socio-politique qui tend vers une assimilation forcée des Sahraouis, et un contrôle des corps colonisés et des résistances basé sur le tout répressif.
Pour les Sahraouis, ce désert est une prison à ciel ouvert qui se matérialise par leur impuissance à faire respecter leurs droits sur ce territoire. Un combat de respiration oppose au quotidien deux forces : le colon et le colonisé. Plus les Marocains occupent l’espace, et plus la respiration des Sahraouis est étouffée.
Ce projet s’articule autour d’un travail photographique et un travail d’écriture de témoignages mené avec des habitants sahraouis.
Les portraits, pour la plupart anonymes, sont réalisés à l'intérieur des maisons ou sur les toits, afin d'éviter la délation des colons marocains et échapper à la surveillance policière.
Les textes sont écrits sur des papiers d’emballage de sacs de ciment collectés sur les chantiers de construction.
Ce support d’écriture fait écho aux récits des survivants des disparitions forcées du bagne secret de Kalaat M’gouna.
Face à l’augmentation du nombre de disparus (entre 1976 et 1991), des travaux d'adaptation furent réalisés dans ce bagne. Les sacs de ciment glanés par les prisonniers seront un des rares supports clandestins d’écriture et de communication entre les cellules.
Les ex-disparus expriment le sentiment qu’à leur libération ils migrent d’un bagne à une plus grande prison : le Sahara occupé. Un sentiment que partage les sahrouis vivant sous occupation aujourd'hui.
Les autorités marocaines refusent l’entrée au Sahara Occidental et expulsent les observateurs étrangers, qu’ils soient journalistes, membres d'une ONG, juristes, militants, députés...
Inaudibles et invisibilisés par cet enfermement depuis 1975, les témoignages des Sahraouis ont ainsi été écrits clandestinement sur ce même support, avec le risque quotidien qu’ils disparaissent aux mains de la police marocaine.
Ce papier de ciment fait également référence à l’expansion urbaine résultant du peuplement marocain. Deux entreprises européennes sont implantées illégalement et produisent le ciment.
Aujourd’hui, le développement du Sahara est un argument central du Maroc pour justifier et légitimer sa présence illégale. Les constructions et l’urbanisme figurent comme une vitrine pour cacher l’oppression et les violations du droit international.
La forme finale de ce projet résulte à la fois de l'aspect clandestin de la réalisation et de la censure opérée par les autorités. Deux disques durs externes seront secrètement volés par la police marocaine et remplacés par des disques vides. Les témoignages manuscrits, volés et remplacés par des feuilles vierges. Enfin, un dernier disque dur disparaît d'un ordinateur portable lors d'une opération policière.
Malgré ces aléas, certaines photos sont sauvées et les témoignages ont été recopiés sur le même papier par les réfugiés sahraouis en France. Les faces extérieures des témoignages sont ici présentées à côté des portraits correspondants, et les textes sont donc présentés à part. Il s'agit de souligner qu'à la censure s'ajoute une autocensure, résultant d'une peur des représailles.
L’ensemble du projet expose l'oppression coloniale et ses mécanismes de dépossession (territoriale, historique, culturelle, économique, documentaire). À la marge de la représentation depuis 1975, la participation des habitants et l’ensemble des témoignages sonnent comme un cri d’existence face à l’interdiction d’être et l’injonction à disparaître.
Une respiration de combat, souligne les tensions entre le visible et l'invisible.
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Tayammum
Le niveau d’oppression et la peur se mesurent au silence. Ces pierres appartiennent à des femmes qui n’ont pas témoigné par écrit au projet Une respiration de combat. Leurs pierres témoignent à leurs places de la peur ambiante et de l’existence d’une population « qui crie en silence au secours ». Le mot Tayammum désigne l'acte des ablutions sèches avec les pierres ou le sable. Le sens littéral de ce mot fait référence à l’intention de parvenir à quelque chose.
Collectée au désert, la pierre a une valeur sentimentale pour celui qui l’a sélectionnée parmi tant d’autres, ou celui qui en hérite de ses parents. Au-delà de son caractère religieux, c’est un objet qui relève du mémoriel et d’un attachement territorial au désert, amplifié par l’enfermement colonial dans les villes.
Après des années de prières, elle devient lisse, polie par les caresses, la foi. Elle écoute, et elle absorbe. Dans un territoire oppressif où la parole est cloisonnée, censurée, et auto-censurée, elle fait aussi office de refuge.
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Ya pas d'problèmes
45 feuilles marrons, format 31 x 65 cm | 25 feuilles A4 | Photos
Les témoignages écrits par des sahraouis ont secrètement été volés et remplacés par des feuilles vierges - une manière pour la police marocaine de me signaler son implication. Le vol au lieu d’une saisie policière permet également d’invisibiliser la censure opérée.
Ces feuilles vierges, laissées par les policiers, sont présentées aux côtés de plusieurs documents : le recours en 2022 au tribunal de Marrakech contre l'interdition d'accès au territoire pour « menace à la sécurité nationale », puis des retransciptions d'enregistrements audios des échanges avec les autorités marocaines à la préfecture de police de Tanger, et quelques photos et vidéos au port de Tanger Med.
« Ya pas d'problèmes », c'est ce que me répète les policiers marocains dans les enregistrements en octobre 2020, lorsque je souligne les vols et le ciblage de mon travail. Pas-à-pas, l’ensemble des documents nous plonge dans le décalage et dans l’absurde.
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El-Aaiún / Laâyoune
1- La ville dessinée et racontée par des habitants sahraouis (Vidéos).
2- Plans cadastraux marocains de la ville (impressions formats A1/A0).
L’ensemble raconte l’invasion, l’appropriation des terres, la politique de peuplement marocain, l’expansion urbaine, l’enfermement et les mécanismes de surveillance de la minorité sahraouie dans cet espace.